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MAXIME MOTTET AU SOMMET

Publié le  par Philippe Vande Weyer. Le Soir.be

On vit parfois/souvent de préjugés, même en matière de compétitions sportives, par ignorance ou par dédain. Jetez un coup d’œil, via le lien qui se trouve sous ce surlignage, sur la finale des Mondiaux de tir aux clays, discipline fosse olympique, qui s’est disputée dimanche à Lonato, au bord du lac de Garde, et essayez de ne pas vous prendre au jeu. De ne pas vous ronger les ongles. De ne pas ressentir l’incroyable pression qui a pu peser sur les épaules des six hommes qui l’ont disputée. De ne pas compatir avec le Belge Maxime Mottet qui, en quelques minutes, s’est vu tour à tour en route pour le match pour l’or, premier éliminé possible de la course aux médailles, et finalement 3e d’une épreuve terriblement haletante où le contrôle de ses nerfs, dans un environnement terriblement tendu, est impératif si l’on veut réussir. C’est impossible !

Une concentration de tous les instants et une médaille de bronze au bout du chemin: Maxime Mottet a frappé fort aux Mondiaux de tir aux clays. Photo ISSF.

Inconnu au bataillon de ceux qui ne suivent pas sa discipline à la trace, Maxime Mottet, solide gaillard au look de « hipster » multi-tatoué, a réussi un sacré petit exploit en dominant ses nerfs et 167 des 169 participants qui étaient sur la même ligne de départ que lui, pour s’offrir une médaille de bronze et une place de quota pour les Jeux de Rio, ce week-end, en Italie. Le tout, à 24 ans et alors qu’il ne figurait qu’au 57e rang de la hiérarchie mondiale au départ. « L’âge moyen des finalistes aux championnats du monde, d’Europe et aux manches de Coupe de monde, ces deux dernières années est de 38 ans, dit-il. Le tir aux clays, c’est un sport où la jeunesse ne prime pas. Parce que plus vous prenez de l’expérience, plus vous apprenez à rester calme. Moi, dans la vie de tous les jours, je suis assez impulsif ; mais pas quand je tire ! »
Pendant les deux jours de compétition, lui, le « gamin », n’a – presque – pas bronché. Lors des qualifications, après avoir commencé avec deux séries parfaites de 25 plateaux abattus sur 25, il a terminé 6e avec un total de 120 sur 125, ce qui le qualifiait à la fois pour la finale et pour les Jeux. Loin de relâcher les vannes après la réussite de ce double objectif de départ, il a alors entamé la finale tambour battant en prenant la tête après les deux premières séries de cinq grâce à un sans-faute.
« La finale, c’était déjà une consécration, mais je voulais aller plus loin et chercher la médaille, explique-t-il. Je suis trop compétiteur pour me contenter du minimum et je voulais prouver que je n’étais pas arrivé jusque-là par hasard. Après le 10 sur 10, je me suis rendu compte que j’étais bien parti pour le podium et c’est là que la pression est montée. A ce moment, tout va très vite et il est difficile de faire abstraction de l’enjeu. Tout se joue dans la tête. Il y a plein d’informations qui vous traversent l’esprit. Je n’étais qu’à cinq plateaux du match pour l’or et j’ai malheureusement loupé les deux premiers de la troisième série, puis le tout dernier. Sur le moment, je m’en suis voulu, d’autant que j’ai manqué mon premier tir au « shoot off » qui me reléguait vers le match pour le bronze. Heureusement, j’ai réussi à reprendre mes esprits et à m’imposer 13 à 11 contre l’Espagnol Alberto Fernandez. »
Jusqu’à ce week-end, s’il avait terminé, certes, 2e de l’Euro junior 2008, Maxime Mottet n’avait jamais réussi à entrer en finale d’une compétition du calibre de ces Mondiaux (il avait manqué de peu celle de la manche de Coupe du monde de Gabala, en Azerbaïdjan, en août). Y être arrivé à Lonato l’a comblé d’aise car, comme il le souligne, « c’est un stand très compliqué, où les scores ne sont jamais très haut, à la fois pour des raisons de visibilité et parce que les lanceurs de plateaux ont des bras très courts ce qui fait que ceux-ci partent très violemment » mais aussi parce que « tout le monde était là ».

L’Italien Pelliello (argent), le Slovaque Varga (or) et Maxime Mottet (bronze) (de g. à dr.) sur le podium. Photo ISSF.
L’Italien Pelliello (argent), le Slovaque Varga (or) et Maxime Mottet (bronze) (de g. à dr.) sur le podium. Photo ISSF.

Cette première consécration, c’est aussi le fruit de 10 ans de pratique et d’entraînement pour le tireur de Saint-Hubert, qui s’est orienté vers sa discipline vers 14-15 ans quand son père lui a indiqué qu’au lieu de tirer sur des cannettes avec sa carabine à plombs, il ferait mieux de rejoindre le club voisin de Bras !
« Mon grand-père était ingénieur des eaux et forêts et était chasseur, ajoute-t-il. Cela m’a sans doute aussi influencé même si moi, je ne tire sur rien de vivant ! »

Employé au bureau d’avocats de son père, Maxime Mottet pratique son sport en véritable amateur, mais bénéficie, grâce à ce statut, d’une liberté quasi complète pour s’entraîner et/ou partir en stage. Le tir occupe, dès lors, la majeure partie de sa vie et ses occupations autres sont très limitées.
« Je n’ai ni le temps ni l’énergie de faire autre chose, avoue-t-il. Quand je reviens d’une compétition, j’ai besoin de récupérer à la fois mentalement et physiquement (à Lonato, il a tiré 155 fois en deux jours et donc soulevé autant de fois sa carabine de 4,250 kg, soit 658,750 kg). Une épreuve comme celle de ce week-end, cela « pompe » tant elle nécessite une grosse concentration. »
Il avoue ne voir son entraîneur, le Français Marc Menessier, que « deux ou trois fois par an ». « Mais le reste du temps, je suis son programme à la lettre dans les stands où je me rends, au Luxembourg, à Genappe ou à Noorderwijk (en Campine), dans le club de Frans Peeters, le médaillé de bronze des Jeux de Séoul. »
Maxime Mottet rêve, forcément, de suivre ses traces, dans moins d’un an, aux JO de Rio, pour lesquels il ne va pas tarder à entamer sa préparation en apportant quelques modifications à son programme habituel. « La trêve hivernale sera sans doute moins longue… », avoue-t-il.
Mais ce sera pour la bonne cause.